Je dois avouer que les plus beaux accomplissements de mon existence tombent souvent sous la rubrique des : “Seemed like a good idea at the time”. Des sauts de logique que j’ai fait pour des raisons qui m’échappent même plusieurs années suivant la dite décision. Vous seriez épatés (je sais que moi je le suis) par le nombre de fois que je m’assois à tenter de comprendre comment je me suis retrouvé où je suis. Comme du somnambulisme existentiel il m’arrive souvent de me réveiller sans me rappeler comment je me suis rendu à ce point dans ma vie.
Il existe plusieurs exemples de miracles biographiques qui tombent sous cette rubrique, notamment celle que j’entame ici : Une confession créative, mais comment me suis-je retrouvé à écrire un « making-of » pour un livre?
Je suis pleinement conscient que le « making of » ci-présent n’est pas nécessaire, peut-être même pas désiré, mais le projet qu’est « Seven days et Six Nights » (le nom que je lui donne) m’a amené à parler de moi et de mon monde d’une manière qui m’aurait jadis rempli d’inconfort. Je me rappelle d’une époque où j’étais incapable de figurer dans le centre d’une conversation, un inconfort qui perdure encore à ce jour. Mais il semble que de parler de ce que j’ai fait m’empêche de parler de moi-même, d’user de ce projet comme méta-récit de mon existence et c’est en fait ce que Seven Days était. Une manière d’aborder ma vie, hors contrôle à l’époque, d’une manière externe à la logique, à la cohérence. Si les BD qui émergent de l’album de Scott DaRos, BleuBird et Shibitt concordent si puissamment, c’est sans doute car ces 7 pistes m’ont servi d’ancre à la réalité. Comme un arcane de Tarot ou une cérémonie de I-Ching, c’est en me plongeant dans l’album que je suis arrivé à m’en servir comme miroir et donc à comprendre des parties de moi qui me composaient. De la musique au texte, j’ai vu l’opportunité de revoir ma vie en entier, ensuite, les artistes ont mis les phrases en images. C’est donc leur vision qui à rendu le tout si magnifique. Leur perspective, leur personnalité, leur talent, qui à fait de cette confession d’un homme devant un album, un projet si magnifique et merveilleux. Scott, Jacques, Masa, James, Julien, Masaki, Satoshi, Simon, Martin et Jeik. Chaque strip qu’ils ont illustré m’est apparu comme une grande surprise, un grand choc de voir mes paroles réinterprétés d’une manière à les rendre plus belles que ce que j’avais originellement prévu. Cette coopération, que dis-je, cette fusion entre deux imaginaires m’apparaît encore plus comme un signe de la suprématie artistique de l’art bédéesque. Le fait qu’une idée passe à travers deux imaginaires avant de se manifester fait, pour moi, les plus belles circonstances de création. Je m’agenouille devant eux car pour moi ce sont eux les vrais artistes, je ne suis que le miroir défigurant d’une œuvre si puissante qu’elle m’a fait repenser ma vie en entier.
Donc, pour continuer dans cette vague de démesure, continuons avec le « making-of » du premier strip :
Aurora Aura
J’ai commencé à penser à Aurora Aura assis dans ma cuisine, je regardais dans le vide, comme d’habitude. Ah, voyez, ici, la vue.
Et le détail qui à accroché mon attention. (je commence à trouver cet exercice d’écriture weird, je deviens « self-conscious (qui s’auto-corrige en français comme self-couscous, j’imagine que c’est plutôt ça que je veux dire)», je trouve que c’est pédant de faire telle chose, je vais finir ça vite)
Donc Aurora Aura à commencé comme une volonté de faire l’histoire d’une photo, celle-ci en conséquent :
C’est pas mal un classique, touriste devant une énorme vallée, avec une ville dans le fin fond. La photo « microscopique/macroscopique » par excellence. Bon, c’était le projet original, d’avoir une sorte de zoom-in sur ce classique de photographie touristique, de montrer chaque atome d’action qui existe dans un cliché si immense, mais il me fallait un robot, et cela je ne crois pas avoir à justifier pourquoi.
Aurora Aura est une réflexion sur cet infiniment grand illustré par l’infiniment petit de nos existences. Comment nous vivons des situations qui sont des convergences de circonstances quotidiennement sans être impressionné par chaque moment. J’ai déjà croisé quatre personnes différentes au même point dans un parc un mardi soir à 4 heures du matin et j’étais étonné par l’extraordinaire concours de circonstances qui à mené à cette entrecroisement. Malgré que je ne connaissais aucun (DOUBLE NÉGATIVE) de ces braves gens, je pouvais m’imaginer que chacun d’eux avait pris un parcours différent et particulier pour arriver à notre point de rencontre. 4 heures du mat, 4 personnes se rencontrent pour rien, hochement de tête, départ, drôle de concordance.
Visuellement, c’est ce que je tentais d’illustrer dans Aurora Aura, le fractal, la coïncidence manifeste, l’aléatoire de nos existences (pédant, si je continue d’écrire comme ça, j’aurai à me mutiler publiquement). Tout cela à travers les trois formes canonisées de l’humain : Le corps (1ère page) Le cœur (2ième page), l’Esprit (3ième page).
Les trois manifestations du monologue intérieur simultané. Le robot qui est corps qui pense à son cœur, son émotivité en usant de son esprit. Trois artifices, inexistant pour chacun des autres sphères d’état. Mon directeur à l’époque Ollivier Dyens (qui théorise beaucoup sur la place de la robotique chez l’humain, en plus d’être un vif esprit concernant la frontière entre l’organique et l’inorganique) posait toujours des questions du genre : L’humain, est-ce juste un cerveau dans un bocal qui rêve d’avoir un corps? Je crois qu’il me restait un peu de lui dans ce strip.
Le robot est essentiellement une figure de la mécanique qui devient de plus en plus microscopique et biologique.
Les trois esprits à la fin sont des grand-mères, ce sont à la fois les trois fées (qui donnent un cadeau, un âme)de tout bon conte, mais aussi les gens de Grandma, le label du groupe Triune Gods. J’ai tenté d’avoir tout le monde de l’album présent dans le comic. Vous pouvez aussi voir Ganesh dans la première case, je le mets toujours là parce que c’est une des personnes à qui je me confie le plus depuis la dernière année. Un dieu avec une tête d’éléphant est souvent la meilleure oreille qu’on puisse trouver. Juste de même…
jeudi 1 décembre 2011
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